dimanche 17 juin 2012

Pic et pic et colégram...

Chose promise chose due ! Je profite d’une fin d’aprem dominicale pour me mettre à écrire… Il est 18h30 et il fait déjà noir depuis deux heures. C’est bientôt le jour le plus court et le début de l’hiver. Tiens donc ? L’hiver ? Je croyais qu’on y était déjà depuis quelques temps pourtant. Cela fait un peu plus de quinze jours que je suis revenue sur Navarino et je n’ai même pas eu le temps d’entrevoir mon sol d’accueil...couvert d'une épaisse meringue! Au bout de dix jours, entre 60 et 80 cm de neige se sont accumulées, la neige atteignant même les rives du canal Beagle !

















Brrr, je pense bien à vous sous le soleil et plus que le soleil, ce sont les heures de jour qui me manquent ! Je vais revenir toute blanche !

Malgré une météo capricieuse, je n’ai pas abandonné le terrain pour autant et je suis sortie dés que je pouvais, avec de la neige jusqu’en haut des cuisses parfois ! Bueno… Vous allez me dire… on est « manipeur de l’extrême » on on l’est pas ;-) ! Hier, j’ai quand même bien apprécié la surprise : le programme vient d’acheter des raquettes ! Une grande prems pour moi ;-) , ça me change complètement la vie même si ce n’est pas toujours facile, avec des raquettes, de crapahuter sur les troncs tombés à terre ou de se faufiler entre les taillis.




Et tout ça pour continuer à … étudier l’écologie du Pic de Magellan (Campephilus magellanicus).

Cette espèce, intimement liée aux forêts de Nothofagus (faux hêtres), est endémique du sud de la Patagonie. Avec ses quelques 40 cm de long de la pointe du bec à la queue, c’est une des espèces de pics les plus grandes au monde. Pas de risque de confusion : c’est le seul pic noir de cette taille au sein de cette zone. Il existe un fort dimorphisme sexuel : le mâle possède une tête rouge écarlate surmonté d’une petite crête alors que chez la femelle, seule la base du pic est rouge. Cette dernière possède une crête beaucoup plus longue que le mâle.







Cette espèce vit en famille : en général, on retrouve un couple plus le juvénile de l’année et l’immature de l’année précédente. Le fait de rester tant de temps avec les parents résulterait de la nécessité à apprendre à se nourrir. Et oui pas facile la vie de pics : il faut sans cesse se cogner la tête… non le bec contre les arbres pour réussir à trouver larves et insectes xylophages (qui se nourrissent du bois) qui composent la majorité de son menu. Il peut aussi occasionnellement se nourrir de jeunes poussins et de fruits et il a déjà été pris en flagrant délit de consommation de lézard et de chauves-souris !

Chaque année en octobre-novembre, le couple construit son nid à l’intérieur d’un tronc creux. La femelle y dépose de un à deux œufs. Mais si les deux éclosent, malheur au plus faible qui sera abandonné. En effet, toute l’énergie des parents est concentrée à élever un jeune sur lequel ils misent la pérennité de leurs gènes ! Chez le couple pic, c’est partage des tâches :Maman comme Papa s’affèrent pour s’occuper de leur petiot : garder le nid, chercher à manger et nettoyer son nid. En un peu moins d’un mois, en décembre-janvier environ, le jeune pic pourra sauter du nid et commencer à suivre ses parents.

Et que fais-je donc moi dans tout ça?

Le but de mon travail ici est de suivre 6 familles de pics afin de:

1) cartographier leurs territoires. Cela doit permettre de connaître la taille moyenne de l’aire nécessaire à une famille de pic pour se nourrir et se reproduire ; ceci en relation avec le type de forêts (espèces, âge de la forêt, état de conservation) mais aussi de voir si oui ou non les territoires des différentes familles se superposent.

2) identifier les différences en terme d’utilisations du territoire et de la ressource entre différentes périodes de l’année (avant-pendant et après reproduction).

3) identifier les différences de comportement alimentaire entre mâles et femelles

Pour cela, chaque père de famille a été capturé et équipé d’un émetteur radio qui permet de le trouver. Chaque individu possède une fréquence radio différente. Je passe donc mes journées dehors avec une antenne et le récepteur à la main à chercher mes pics ! Un véritable jeu de piste parfois car il faut traverser des tourbières, des zones humides laissées par les castors (les fameuses "castoreras"), des broussailles, de la forêt avec sous bois ouverts comme fermés, de la forêt avec plein de troncs tombés à terre etc ! Pas toujours facile ! Et à cela s’ajoute la rivière à traverser sur des troncs :-/, les nombreuses zones d’échos (roches par exemple qui renvoie le signal radio …) et maintenant bien sûr la neige !



Une fois trouvée la famille, je décris le comportement de chaque individu et l’environnement qui l’entoure ! Et c’est reparti pour une autre partie de cache-cache avec la prochaine famille sur la liste !

Vous avez donc compris, je vais revenir blanche mais avec des cuisses d’enfer ;-) !
N’hésitez pas à me poser des questions si vous voulez en savoir plus !

Et, à bientôt pour d’autres posts !

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