mardi 13 mai 2008

Premières neiges

Dans mon dernier billet, je parlais de « Retour » mais finalement je n’ai pas eu le temps durant ces deux mois de rédiger quelque chose mais bon vous êtes habitués maintenant !

L’hiver arrive à grands pas… Du 14 au 18 avril, le Marion Dufresne était au mouillage devant PAF (Port aux Français). Cette rotation du Marion dans les Terres Australes (Crozet, Kerguelen, Amsterdam) permet de ravitailler les districts et faire un échange de personnel. Désormais, nous sommes 49 personnes à être partis pour l’hivernage proprement dit. Petit à petit, le rythme des manips va être ralenti à cause du mauvais temps et nous allons théoriquement rester plus de temps sur base. Depuis le départ du Marion, nous avons eu plusieurs fois des averses de neige et des journées de grands vents (60noeuds). Les journées ensoleillées se font plus rares et font place à des tristes journées de grisaille. Cependant, les paysages n’en demeurent pas moins magnifiques !

Pour nous les Ecobio, le rythme des manips ne faiblit pas. A peine l’OP commencée que je m’envolais en hélico pour un nouveau coin de l’Archipel. Je reviens tout juste d’une manip à Port Couvreux (du 15 au 28 avril) dans le nord du Plateau Central où j’ai accompagné le VCAT Popchat qui étudie, comme son nom l’indique, les populations de chats de Kerguelen. Les chats ont été probablement introduits à la fin du 19ème siècle et se sont dispersés sur l’ensemble de l’archipel. Celui-ci est considéré comme nuisible puisque il est responsable de la diminution des effectifs d’oiseaux et de la disparition de plusieurs espèces. Leur abondance, leurs caractères morphologiques et leur diversité génétique sont étudiés dans plusieurs sites de l’Archipel afin de connaître le mode de colonisation et les processus d’adaptation de cette espèce au milieu extrême que constituent les îles Kerguelen.

Beaucoup d’espèces de plantes et d’insectes introduits sont également observables à Port Couvreux. En effet, avant la première guerre mondiale, quelques familles ont tenté d’y élever des moutons et ont amené avec elles (volontairement et non volontairement) des graminées (herbes fourragères) et des insectes. Cet essai d’élevage s’est soldé par un échec mais a laissé quelques traces... Quelques tombes et autres vestiges couverts de rouille persistent encore sur le site… comme de nombreuses graminées et le fameux insecte prédateur : Oopterus soledadinus. Celui-ci aurait voyagé depuis les Iles Falkland jusqu’aux Kerguelen via le fourrage amené pour les moutons. Aujourd’hui, cet insecte prédateur est présent sur la plupart de l’archipel et menace les populations d’insectes autochtones. Les insectes kergueléniens sont, en effet, pour la plupart de calmes décomposeurs ou végétariens dont la naïveté ne permet pas de faire face à la férocité du nouveau venu. La biologie, l’écologie et la génétique des populations d’Oopterus font l’objet de recherches qui permettront de comprendre le succès de sa dispersion rapide et son impact sur les populations d’insectes autochtones.

Une journée après Port Couvreux, je suis repartie pour l’Ile Australia sur laquelle nous faisons des suivis mensuels sur diverses espèces de plantes. Nous suivons la phénologie (différents stades de reproduction d’une plante : de l’absence totale de fleur jusqu’à la présence de graines matures) du chou et de l’Acaena et de d’autres plantes autochtones. Le chaland nous a déposé sous la neige : je reconnaissais à peine mon île sous son grand manteau blanc !

Malgré le temps qui se gâte, nous aurons encore un planning chargé en mai. Nous allons mesurer et compter les feuilles de choux sur les îles Guillou, Cochons et Verte (cette manip fait suite à celle effectuée en février sur ces mêmes îles). Ces mesures nous permettent de suivre leur croissance et leur survie au cours des années et ainsi d’étudier leur capacité de recolonisation après l’éradication du lapin. De la même façon, nous mesurerons les coussins d’Azorelle et compterons leurs graines.

De plus, nous allons piéger des souris sur Guillou, Cochons et Isthme Bas (zone près de la base). Cette manip vise :

- à évaluer le nombre de souris sur ces 3 sites et à le corréler à des paramètres comme la présence ou non de prédateurs et parasites, aux températures…

  • à connaître leur régime alimentaire

  • à faire des analyses génétiques pour étudier les processus d’adaptation des souris au milieu particulier que constitue Kerguelen.


Je pars lundi pour l’île Guillou, un nouveau mois de manip « intense » commence !! Les journées de travail à l’extérieur seront par la force des choses bien plus courtes. Le soleil ne se lève qu’à 7h et se couche vers 17h… Pour occuper notre temps libre le soir, pas de problème : au programme dissection de souris !




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